Je pars vers cinq heures trente avec Hervé en direction d’un vieux châtaignier surplombant un ancien champ de maïs. Sur le chemin nous conduisant à cet endroit, nous apercevons, au font d’une allée de Douglas, un chevreuil adulte. Il se rapproche de nous, nous l’observons rapidement à la jumelle et continuons notre chemin. Impossible de voir correctement ses bois. Au bout de vingt minutes de marche, nous entrons dans le champ après l’avoir longuement inspecté pour nous garder d’une rencontre fâcheuse qui pourrait mettre notre affût à l’eau.
A six heures, nous sommes dans notre arbre. Temps chaud, vent d’ouest, peu de nuages.
Six heures dix : une trace grisâtre, à environ cinquante mètres, sur le bord droit du champ (nous sommes face au nord) : c’est un vieux mâle, on ne le verra jamais très bien. Quelques secondes après, deux faons, âgés d’un an, passent devant notre arbre, à quinze mètres. Leurs tâches sont à peine visibles. Ils ne s’aperçoivent pas de la présence du mâle et restent très proches.
À six heures quinze, une chevrette arrive du coté opposé aux faons (coté ouest) Elle broute et mâche bruyamment, on entend ses mâchoires claquer. Elle repère les faons, s'en approche assez lentement et commence à les embêter. Je pense que ceux-ci sont ses petits de l’année précédente qu’elle essaie de faire partir. Sa rencontre avec un mâle sera impossible si elle est encore accompagnée de ses faons. Les deux jeunes chevreuils se réfugient sous les fougères à quinze mètres de là où nous sommes. La chevrette part, puis revient vers sept heures dix. Elle retrouve les petits, les embête et s’en va en passant juste sous notre arbre, nous la voyons très bien, elle est à moins de trois mètres. Les faons s'en vont eux aussi. Il ne reste donc dans le champ que le vieux mâle qui est resté impassible à ces histoires de famille.
Sept heures quinze. Un chevreuil entre dans notre champ de vision. (150°)
C’est un superbe brocard âgé d’environ quatre ans. Il apparaît à quarante mètres et se rapproche lentement en broutant. Nous parvenons à bien le voir avec nos jumelles. Il a de très beau bois à six pointes, légèrement incurvés vers l’intérieure, plus usés aux extrémités. Longueur des merrais : environ 22 cm. Sa robe est d’un roux assez clair, très jolie. Il avance avec la dignité d’un cerf. Il descend plutôt en direction du premier mâle qui ne l’a pas aperçu.
Une femelle et ses deux petits arrivent du coté Est. Je les avais déjà repérés auparavant et j’avais pu les photographier.
La femelle s’aperçoit de la présence des mâles et ne reste pas plus de trois minutes. Le premier chevreuil lève la tête et dirige ses oreilles vers l’endroit où viande, inconscient du danger, le vieux chevreuil. Il l’a éventé. Il se rapproche prudemment, la tête haute. L’autre ne bouge pas. Parvenu à une quinzaine de mètres, il lance une série d’aboiements. Le vieux mâle se terre et ne répond pas. Vu la qualité de se bois, il serait fou d’engager un combat. Le beau mâle, de plus en plus inquiet, le contourne par l’ouest en décrivant un large demi-cercle. Il parvient à moins de dix mètres. Il se lance alors à sa poursuite, tête baissée. Le vieux mâle s’enfuit ventre à terre et disparaît, son poursuivant à ses trousses.
Vers huit heures, le beau chevreuil revient, il à l’air plus calme, il se rapproche de nous jusqu’à ce qu’il évente un lapin posté juste devant notre arbre. Un peu inquiet, il avance et passe très près de nous. Il est superbe. Il part, poursuivant le lapin qui est en fait resté à sa place. Il est alors 8eures heures dix. Cinq minutes plus tard, un mâle différant des deux autres - cinq pointes, manque andouiller droit. Bois noirs, massif et bien perlés, il flâne en broutant par-ci, par-là et s’en va. Environ six ans. Il est huit heures quarante-cinq. Neuf heures six, une femelle et son petit (aussi repérés et photographiés auparavant) passent sous notre arbre et entrent dans le champ, rien de spécial, les deux animaux broutent tranquillement.
Il a un magnifique coucher de soleil, le ciel est littéralement enflammé, c’est splendide. La robe de la femelle reflète une lueur orangeâtre, Nous voyons tout en jaune pâle, c’est le plus bel affût de ma vie. Neuf heures quarante-cinq ils partent, nous aussi. En tout, nous aurons vu onze chevreuils.